Combien de préventeurs et de managers déplorent le fait que les opérateurs ne respectent pas ou pas toujours les procédures de sécurité ou de qualité ?
Car c’est vrai, les opérateurs ne respectent pas toujours les consignes, mettant quelque fois en jeu leur santé ou leur sécurité. Ici un opérateur ne va pas porter ses équipements de protection individuelle. Là il va réaliser une tâche sans toujours respecter ce que prévoit la gamme…
Mais pourquoi les opérateurs ne respectent par les consignes de sécurité ?
On remarque souvent que les opérateurs ne respectent pas les prescriptions, même lorsqu’elles visent à les protéger ?
Loin d’être la marque d’une négligence, cet apparent non-respect des consignes témoigne plutôt d’un écart entre les prescriptions – ce qu’on demande aux opérateurs – et les exigences du travail réel – ce qu’ils font réellement. A chaque instant, les opérateurs réalisent des compromis pour réaliser les tâches qui sont attendues d’eux tout en préservant au maximum leur santé. Cela les amène à faire des choix qui peuvent entrer en contradiction avec les consignes reçues, quelque fois au détriment de leur santé et de leur sécurité. Les exemples sont multiples : c’est l’opérateur qui désactive la sécurité de sa machine pour lui permettre d’effectuer des micro-réglages au fil de l’eau sans pénaliser la production, évitant par là des arrêts machine coûteux. C’en est un autre qui travaille bien plus vite qu’on le lui demande, mais pour pouvoir ralentir momentanément lorsque la fatigue se fait sentir. Ou encore celui qui n’utilise pas la machine récemment acquise pour faciliter les manutentions et continue à porter des charges à bout de bras…
Dans tous ces exemples, si les opérateurs n’ont pas « raison » d’adopter ces comportements, ils ont « des raisons » de le faire : réaliser sa tâche avec la précision attendue, respecter la cadence de travail tout en préservant sa santé, améliorer la qualité, gagner du temps, etc.
Vers une sécurité intégrée
Alors comment faire en sorte que les consignes, notamment de sécurité, soient respectées par les opérateurs ? Comment s’assurer que la toute nouvelle machine sera utilisée comme il est prévu qu’elle le soit ? La menace de sanctions ne suffira pas…
La solution passe par une analyse approfondie du travail réel des opérateurs. Il est fondamental de comprendre quelles sont les contraintes auxquelles ils font face. Mais également identifier les ressources qu’ils mettent en œuvre pour atteindre leurs objectifs.
En effet, ce n’est qu’à la condition d’une bonne compréhension des exigences du travail que les consignes et prescriptions s’avèreront adaptées et, par-là, « respectables » par les opérateurs. En effet, comment exiger d’un opérateur qu’il utilise l’escabeau règlementaire quand celui-ci l’empêche de réaliser la tâche avec la précision requise ? En comprenant « leurs raisons », on est mieux à même de proposer moyens, procédures et techniques qui favorisent à la fois la santé et la performance.
En s’attachant justement à la compréhension des déterminants du « travail réel », l’ergonomie vous permet de réduire cet écart entre prescriptions et activité réelle des opérateurs. Les gains d’une telle démarche peuvent être considérables : amélioration de la qualité, réduction des atteintes à la santé, mais également rentabilité des investissements. En effet, quoi de plus frustrant qu’un investissement qui s’avère imparfaitement adapté aux opérations pour lesquels il a été acquis ?
Virgile Mejean
ergonome
Unité Poitiers
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